P R E M I E R E_ S E A N C E

Celle-ci est digne d'un après braquage chez Méliès.
Putain de butin !

Diamant 13, de Gilles Béat
Avec son générique haché en noir et blanc, ce film du « revenant » Béat (ou Béhat), d'après un roman d'Hugues Pagan, annonce d'entrée la couleur. Ce sera un polar sombre, désespéré, poisseux. Affirmatif.
L'intrigue est relativement classique. Mat', vieux flic de la crim' travaillant de nuit, est désabusé un max. Novak, un ami (Olivier Marchal), lui propose une combine pour remonter à la surface, un détournement d'argent sale. Un plan parfait, facile à mener à terme. Hélas ça dégénère et Mat' se retrouve coincé dans une affaire de corruption, tandis que son poteau Novak se fait tabasser, avant d'être exécuté d'une balle dans la bouche, à l'exemple d'autres protagonistes. Ripoux, politiciens, bœufs carottes, trafiquants, le listing est traditionnel mais le ton du film, beaucoup moins. Le réalisateur filme souvent au ras du bitume, donnant au spectateur l'occasion d'entrer dans les scènes. Le misérabilisme, lui, est assuré. Du « Bernard Buffet » années 50 à la sauce 2000 ! Décors grisâtres, débauche de tags et d'ordures ménagères et de véhicules en rade. Les domiciles sont itou, tristes, limite glauques. Aucune « couleur du noir ». Et le rose et bleu n'ont pas lieu d'être.
Gérard Depardieu (Mat') voyage au bout de cet enfer en zombie massif, sensible aux nombreux élans féminins mais n'y répondant jamais. Il fait parfois songer au Jean-François Balmer crépusculaire du « Boulevard du Palais » de la TV ! Le héros fait circuler le sentiment. Ce retour de Depardieu est un régal, en attendant le « Bellamy » de Chabrol. Diamant 13 s'égrène sur une musique envoûtante, partition en évidence sur le piano naufragé dans la baraque pourrie de Novak. Du polar solide, même si la trame tient dans un chargeur de Glock. Détente assurée. A mon avis, supérieur à « MR73 » cité sur l'accroche de l'affiche. Du diamant brut. Du dur.

Cinéma policier français, pas mort.

 

 

L'homme de la Riviera, de Neil Jordan
Encore du diamant « taillé à la serpe » !
Pur polar en demi-teinte, à Nice, dans une ambiance électrique.
L'idée majeure est : Deux casses au lieu d'un. Le casino sur la Riviera souhaite renouveler sa clientèle. Administré en majorité par des Japonais ayant dans les années 80 placé beaucoup de fric dans les œuvres d'art, le dit casino accroche sur ses murs des tableaux de Cézanne, Picasso, Van Gogh, Modigliani, etc., pour intéresser les clients. En vérité ce sont de « beaux » faux. Les vrais, assurés, sont à quelques mètres dans une villa super protégée. Et c'est un certain Emir Kusturica qui s'est occupé de la sécurité et est chargé de la vérifier régulièrement. L'idée d'un casse est suggérée par Raoul (Gérard Darmon), avec la complicité d'Emir, guitariste des systèmes d'alarme ! Ou comment déjouer les alertes par l'acoustique. Une affaire d'ondes. Faut un costaud pointu pour driver ce petit monde. C'est Nick Nolte qui s'y met. Massif, allumé, généreux.
Le montage est nerveux, saccadé aussi, par ses arrêts sur image émaillant le film. Nolte nous redonne la méthode de « Bob le Flambeur », pour décrocher de la drogue : Se coucher sur son lit, se menotter un poignet à un des barreaux et, de la main libre, se venger de sa condition en écrasant l'oreiller. La clé des bracelets est à l'abri dans le slip de la mignonne geôlière, vu qu'elle a l'âge d'être sa petite-fille… Et ça fonctionne ! Redevenu clean, Nick le camé, dépravé, joueur, peut enfin fignoler le plan. On claironne, via la balance de service, qu'on va braquer le coffre du casino censé renfermer 15 millions d'euros. Pendant que Robert le Flic sangsue surveille Nolte le joueur invétéré, le reste de la bande s'occupe des vraies peintures en passant par les souterrains. L'imbroglio qui s'en suit, et le final, sont jouissifs.
Une musique additionnelle nous permet de savourer Léonard Cohen, Gainsbourg, Hallyday, avec pour ce dernier une courte tirade sur le rock français, « que dalle par rapport à Elvis et autre Zippeling » !
Chapeau bas et cartes à jouer en vue. A consommer avec plein d'images de films noirs des années célèbres (les 50). Nolte est parfait, et autant désabusé que le Depardieu du « Diamant 13 ». Au début du film, il erre dans les ruelles tel un mammifère HS cherchant son chemin pour un cimetière des éléphants. J'oubliais ! En patron de night-club, Marc Lavoine est pourri à souhait.

 

 

Moins de carats mais un certain éclat pour
Tristan, de Philippe Harel
Une série de morts ressemblant à des suicides amoureux.Une femme flic. Une profileuse. Un serial killer armé de son charme, un certain Tristan. Le salaud se sert de la légende avec Iseult pour inciter de jeunes putes à se suicider. La musique d'entrée donne la sensation de visionner un polar de 50 (cette fois encore). Bon signe. Mais on vire très vite vers le « psy » avec une ex-profiler secouée à la bière (Nicole Garcia). L'enquêtrice, c'est Mathilde Seigner, couillue en diable. Avec un keuf pareil, pas besoin de fliquette ! Mais pourquoi choisir de véritables chouettes mecs, au lieu de prendre des mecs tout court ? Du coup, avec leur femme homme, le casting policier est tout en douceur, presque effacé, pour ne pas dire efféminé.
Cependant c'est bien. Y a un quelque chose, même si la fin est difficile à comprendre. Et, dans ses nouvelles fonctions, la Mathilde assure. Et puis, il y a quelques vues d'Honfleur…

 

Conclusion :
Ces trois diam's peuvent être fourgués facile. Officiel.

 
 

Roland Sadaune

Entracte…