Le Salon du Polar
          à La Maroquinerie / Paris 20ème
          Samedi 11 mai 2002
        
          La Maroquinerie a fait la peau au Polar
        C'est une maison bleue 
          adossée à la colline, ceux qui vivent là ont jeté 
          la clef… la Maroq' c'est presque pareil. Ménilmontant ça 
          n'en finit pas de monter et ceux qui s'y rendent n'ont pas besoin de 
          pass', l'entrée est libre. Sauf que côté couleur, 
          c'est plutôt brique, noir et crème.
          Parvenu à la Maroquinerie, soit par la rue Boyer, soit par la 
          rue des Pyrénées ou soit par la rue de Ménilmontant, 
          on en a plein les pinceaux. Alors, après cette grimpette, quand 
          le commissaire du peuple Polar, Michel Pintenet, avec un large sourire, 
          nous indique la cave, ça l'fait tout juste. Dans le ventre de 
          la Maroquinerie, c'est là que ça s'passe, le Salon du 
          Polar !
          Trente marches plus bas, on y est dans l'univers noir du genre. Que 
          de monde ! Ils sont venus dès qu'ils ont entendu l'appel. Ils 
          sont tous là ou presque, il y a ceux de la porte de Bagnolet, 
          les voisins de Montreuil, et même ceux du sud de Paris.
          Pour moi, qui suis venu d'encore plus au sud que le sud de Paname, cela 
          aurait pu commencer plus mal. Faut vous dire, monsieur, madame, qu'avant 
          la montée de ménilmuche, j'avais eu la joie de trouver 
          sur le pare-brise de mon auto une déclaration d'amour à 
          40 et quelques euros. Je n'avais pas eu le temps de poser ma valise 
          dans ma piaule, les warnings officiants, qu'une belle black, toute proche 
          d'un beau blond portant le même costard bleu, me décochait 
          sa flèche et m'en proposait encore plus, si j'voulais. C'était 
          comme je le sentais. Une ballade gratuite jusqu'à la fourrière 
          la plus proche de Gambetta. Quel pied, sûr que ça va l'faire 
          maintenant à La Maroquinerie !
          Noël Simsolo, venu chiner chez les bouquinistes amateurs, fut le 
          premier sur le tas, suivi de très près par Jean-Hugues 
          Oppel. Dominique Manotti, Thierry Crifo, Jacques Bullot, Gilles Bornais, 
          Christian Robin, Jacques Vallet, Pierre-Alain Mesplède ou encore 
          Cesare Battisti. Un tirage de portraits pouvait s'envisager en présence 
          d'un nombreux public.
         Retrouvons certains autour de leurs définitions 
          du polar et du noir :
        Cesare Battisti,
          Le noir c'est le cri de la mémoire.
        Thierry Crifo,
          Le noir c'est avant le faits divers, le polar c'est après le 
          faits divers.
        Dominique Manotti,
          Le roman noir est social et politique sans sucre et même sans 
          édulcorants.
        Olivier Mau,
          Le polar c'est un western urbain entre Tarantino et Astérix.
        Pierre-Alain Mesplède,
          Le noir, c'est un regard porté sur la réalité par 
          une caméra objective, dirigée par quelqu'un qui ne l'est 
          pas.
        Jean-Hugues Oppel,
          Déclare que dans le "blanc" on voit, on glisse, on 
          avance et que dans le roman noir on trébuche et que tout peut 
          arriver…
        Joseph Ouaknine
          Le polar, c'est le noir de l'homme de son côté le plus 
          sympathique.
        Noël Simsolo,
          Ecrit des romans noirs pour que le sordide puisse devenir sublime.
        * * *
        Côté Vide Grenier, en surface, le 
          monde des chineurs était de sortie dès onze heures. Hélas, 
          la pluie empêcha vite les exposants de rester sur les trottoirs 
          au grand dam d'un ancien de Ménilmontant qui regrettait le passé 
          animé du quartier.
          L'animation squatta le hall et les escaliers de la Maroq', ce qui avait 
          également son charme.
          De tous les ages, de 8 à 88 ans, pour ne pas plagier, les bouquinistes 
          d'un jour avaient de la belle came. BD, polars années 50/60, 
          ésotérisme,
          psychologie, science-fiction, aventure, romans à l'eau de rose 
          et livres pour enfants.
          A 17 heures, au moment du plein du lieu, les représentants de 
          813 essayèrent de présenter leur association. Faut dire 
          que même avec un microphone, dans le brouhaha qui régnait, 
          ce ne fut pas facile. Sans se démonter, Jean-Louis Touchant, 
          le président, retraça les grands moments de 813, des fonts 
          baptismaux à ce jour.
          Après avoir présenté ses collègues, il lança 
          la phrase " casse-gueule " par excellence : Y a-t-il des questions 
          dans la salle ? Généralement s'il n'y a pas un " 
          complice ", c'est le bide assuré. Ca n'a pas manqué. 
          Un visiteur essaya de lancer une pique du style : Pourquoi excluez-vous 
          les membres qui ne payent pas leur cotisation ? Comme la réponse 
          se trouvait dans la question, la justification de la trésorière 
          ne s'imposait pas. Pierre-Alain Mesplède, membre de 813, tel 
          un Monsieur Loyal, relança la machine et avec son humour bien 
          connu, précisa, comme l'oblige la loi, que les expulsions n'avaient 
          pas lieu en hiver. Jean-Hugues Oppel expliqua les spécificités 
          de l'association des amis de la littérature policière 
          et Daniel Moeiro, un éditeur indépendant, raconta quelques 
          souvenirs du temps qu'il écrivait des polars à la chaîne 
          d'après un canevas défini par l'éditeur. Aux mots 
          " Roman de Gare " qu'il prononça pour expliquer ce 
          qu'il signait, cela aurait pu dégénérer en affrontement 
          général, avec tranchées et gaz dans le sous-sol 
          de La Maroquinerie, mais juste un frémissement de contestation 
          parcouru l'assistance ; le conflit n'aurait pas lieu ce jour! L'homme 
          recala son exposé sur la qualité des textes qui suivirent 
          cette période là et encensa les écrivains présents. 
          D'après lui, ceux-ci avaient donné ses lettres de noblesse 
          au roman policier français. Ouf, nous revenions de loin !
          Après quelques applaudissements, la séance fut levée. 
          On eut droit au p'tits canapés et au verre de jaja rituel. Le 
          tout pouvait se terminer en chanson avec un tango de Calos Gardel interprété, 
          comme il se doit, par le Caruso de service dans le monde du polar, Monsieur 
          Pierre-Alain Mesplède. Bravo !
          Repus et satisfaits, les uns et les autres commençaient à 
          plier bagages. C'était la fin du premier Salon du Polar à 
          La Maroquinerie. Tous ceux qui s'y trouvaient jurèrent, croix 
          de bois, croix de fer, si je mens j'irai en enfer, qu'ils reviendraient 
          l'an prochain, nous aussi.
        
          A vos agendas :
          Michel Pintenet, le dirlo du lieu, satisfait du résultat avec 
          près de 1500 visiteurs et plus de 300 livres vendus, a déjà 
          calé la seconde édition. Celle-ci se déroulera 
          sur deux jours, les 9 et 10 mai 2003, avec plus de débats 
          et plus de rencontres.