R O M A N S
17/06/2005

Du nitrate dans le cassoulet
Jacques Bullot

E/dite
230 p / 18 €

Du nitrate dans le cassoulet
Sur fond d’explosion d’usine style AZF à Toulouse, l’auteur nous embarque dans une histoire qui sent le nitrate, le souffre, le plomb et l’oseille. Un employé – criblé de dettes de jeux – de la sécurité de l’usine Nitropod dont un hangar rempli de nitrate d’ammonium a explosé, est sensé avoir disparu lors de l’accident. Pendant que la direction fait tout pour que l’affaire devienne celle d’un attentat – nous sommes quelques jours après celui du 11 septembre aux States – Constantin Mavros cogite et décide de mettre à profit sa fausse mort pour disparaître aux yeux de ses compagnons de jeux. Croyant en un certain Zani, le patron d’un rade qui l’a fait rentrer dans le cercle très privé des joueurs de poker de la cité, il lui balance toute l’affaire et lui demande de le cacher. Comme son nom a paru dans les journaux annonçant sa mort, Constantin Mavros pense échapper quelques temps aux sbires de celui à qui il doit un paquet de fric. Ce laps de temps devrait lui permettre de gagner une belle somme d’argent, vu tout ce qu’il sait sur les problèmes de sécurité dénoncés dans un rapport d’un de ses supérieurs. Constantin Mavros va par tout moyen essayer de récupérer celui-ci et ensuite le monnayer avec les assurances.
Belle arnaque ? Oui, mais c’est sans compter plein de petits grains de sable qui vont à force gripper la machine. Sa petite amie Liliane Legrand, le bistrottier Lucien Zani, Fabert l’enquêteur de l’assurance, Fontana et ses hommes de mains les Peretti, deux givrés et vicieux de première, et Malou, sa dernière rencontre accidentelle.
Si l’auteur Jacques Bullot a écrit un très bon polar, il a aussi en tant que scientifique du CNRS apporté sa pierre pour qu’il n’y ait « plus jamais ça » comme il était inscrit sur les banderoles des manifestants et victimes de l’explosion d’AZF à Toulouse.
L’auteur a ajouté à son roman un dossier sur toutes les affaires impliquant le nitrate d’ammonium depuis près d’un siècle. A lire absolument, même si le cassoulet de tante Marie a du mal à passer !

Bernard Bec


Marseille la ville où est mort Kennedy
Maurice Gouiran


Editions Jigal
255 p / 16 €

Marseille la ville où est mort Kennedy
Tout commence par l’intrusion d’une gisquette, un brin affolée, dans la vie quasi monastique de Clovis Narigou, le héros cher à l’auteur. Le vallon de la Varune ne serait-il plus ce qu’il était ? Pourtant il y a toujours Milou, Frise-Poulet, Tine et encore bien d’autres qui font les belles heures du Beau Bar. La belle vie !
Cette galline – je la fais façon « l’Estaque » – a des choses à raconter à Clovis. Il devrait se souvenir d’elle. Elle était venue avec deux amis le rencontrer pour qu’il leur parle de la French Connection, because qu’ils voulaient faire un docu sur le sujet. Un peu largué, l’ancien journaleux pédalait, pédalait. La mémoire lui revenant, tout s’arrangeait ou presque pour la môme. Pas pour lui. Les deux potes de Neïla, Albin et Assad, en reportage suite à ses conseils, s’étaient fait dessouder chez un certain Toussaint Popolasca…
Alors que vient faire la mort de Kennedy dans cette histoire ? C’est simple ou presque. Le Maurice Gouiran, alias Clovis Narigou, suite aux meurtres supposés de l’Estaque, revisite la période de l’après dernière guerre mondiale sur les bords de la Méditerranée et ensuite l’histoire des States par rapport à l’assassinat de JFK. Certains de la pègre marseillaise pouvaient-ils être de l’aventure ? Oswald, sûr et certain, n’était pas le seul à presser sur la détente ce 22 novembre 1963. Un, voire deux autres tireurs devaient être embusqués pour supprimer le président des Etats Unis d’Amérique. Mais pourquoi des français ?
Un conseil : ce livre est à lire entre les lignes. L’auteur s’est servi de sources infaillibles et raconte une histoire romancée à travers l’Histoire mondiale des cinquante dernières années du 20e siècle. Au lecteur de faire la part des choses.

Bernard Bec


Mister Flash, gentleman gangster
Jean-Pierre Mocky

Flammarion
310 p / 18 €

Mister Flash, gentleman gangster
Tout commence pour Mister Flash en 1933, à la Saint Nicolas lors de la Fête des Masques au cœur de la Vojvodine polonaise.
La Comtesse Anna Ivanovna Cabalewsky est séduite et engrossée cette nuit de folie et de débauche par un homme masqué se prétendant maréchal-ferrant. En réalité, sous le déguisement et le masque, se cachait le lieutenant-colonel Léon Fédorovitch Chaztialapine, qu’elle épousera ensuite, son ventre s’arrondissant rapidement à vue d’œil. Flash allait voir le jour. Alexandre pour Léon, Alexis pour Anna, le petit Flash se prénomma comme sa mère avait décidé. Son père, Léon, s’en fichait. Il l’appellerait Alex.
Léon, parlons de lui. Mythomane jusqu’aux bouts des ongles, le père de Flash se disait russe blanc orthodoxe mais en réalité était (peut-être) juif et petit-fils d’une tchétchène. Flash s’éduqua à travers les histoires racontées par son père, par les conversations entendues derrières les portes et par les scènes de vie entrevues par le trou des serrures.
Anna, sa mère, baissait bien souvent les bras et la garde devant toutes les histoires que Léon lui racontait et les frasques de son lieutenant-colonel qu’elle devait supporter. Elle savait son mari volage et menteur, mais en était fière. Il était le père de son fils.
Mais revenons justement à ce fils, Alex le héros du livre de Mocky. Il devint Mister Flash. Un surnom qui lui vient de sa précocité sexuelle et de son mental de sprinter. Rejeton d’un père arnaqueur, il deviendra justicier et défenseur de causes comme la restitution des biens juifs ou le mariage des prêtres. Mister Flash entrera même en politique…
C’est le roman idéal à emmener partout cet été. Il permettra au lecteur de prendre son pied sur une plage du Roussillon parmi cinquante mille autres personnes ou d’oublier qu’il y a les gosses et la belle-doche qui l’attendent au camping.

Bernard Bec


Corcovado
Jean-Paul Delfino


Métailié
400 p / 20 €

Corcovado
L’honneur d’une femme légère est mis à mal dans un bistro de Marseille et voilà Jean Dimare qui le défend et dessoude le goujat, presque par accident. Seulement le mort est le fils d’un parrain de la capitale phocéenne. Quoi faire ? Embarquer vite sur le premier bateau… en partance pour Rio Janeiro. Nous sommes le 1er janvier 1921. L’aventure, au vrai sens du mot, peut commencer.
Recueilli à son arrivée par un oncle Dom Francisco, sa femme et sa fille Emivalda, il devient tout d’abord un gratte-papier comme son nouveau père, prend le nom de Joao Domar par la même occasion, et a droit à des « Doctor » Domar. Tradition brésilienne oblige.
Le fonctionnaire qu’il est devenu, bien malgré lui, tourne en cage. Le Brésil tout en mutation devrait le combler d’une autre manière. En plein projet de la construction du Christ du Corcovado, ce sont d’autres tentations qui le motivent. Le regard d’un indien qu’il croise plusieurs fois l’intrigue mais ne l’empêche pas de changer de vie et de devenir trafiquant d’alcool et maître du « Jogo do Bicho ». Avant le bout de la route, il y aura la violence…
Ce Corcovado est le premier tome d’une saga qui en comportera trois. Chacun relatant dix années de la vie d’un Brésil qui est en pleine mutation sociale et économique. Ce roman, également tout en couleurs et en traditions indiennes, africaines et blanches, devrait-être le livre de l’été 2005 pour un grand nombre de passionnés d’aventures exotiques et de réalisme.

Bernard Bec


Le festin des anges
Danielle Thiéry


Anne Carrière
466 p / 20 €

Le festin des anges
Edwige Marion, commissaire principal, est promue chef d’un nouveau service à Paris. Elle quitte donc Lyon et se retrouve en poste à la Gare du Nord. Nina sa fille, en pleine crise d’ado en fait des tonnes. Trouve que Paris ça pue, que la capitale des Gaules c’était mieux…
Et pendant ce temps-là, madame la commissaire, se retrouve confrontée à une première affaire, suivie de celle concernant le meurtre d’Ange-Lou, une amie de sa fille. Nina ayant réussi à s’échapper des griffes du prédateur, sa mère va cristalliser toute son énergie et son mental à le retrouver. Sur sa route, elle retrouve un ancien amant, Serge Kerman - lui aussi de la grande maison - qui ne va pas lui faciliter les choses. Par son attitude, Marion se mettra à dos sa hiérarchie mais tiendra bon le cap, envers et contre tous, pour que l’assassin d’Ange-Lou soit mis hors d’état de nuire, et que sa fille puisse ainsi se reconstruire psychologiquement. Le tout, en mettant sa vie en péril.
Depuis quelques années, Danielle Thiéry, femme flic moderne jusqu’au bout des ongles, s’était lancée dans l’écriture de romans policiers très documentés côté scientifique, mais dans lesquels les relations humaines n’avaient peu de place. Cette fois, elle renoue avec ce que j’avais apprécié dans ses premiers romans comme La guerre des nains ou Mise à mort. Même si l’histoire qu’elle raconte est contemporaine, le lecteur comprend vite qu’elle l’a écrit avec ses tripes. Le tout en dolby stéréo, silence compris. Celui du début de la scène finale est à réécouter plusieurs fois. Sans oublier les odeurs qui nous arrivent à la figure. Celle du « séchoir » de la crim’ par exemple. En bref, un polar à ne pas rater.

Bernard Bec

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