14e Festival des Etonnants
Voyageurs
Saint-Malo du 7 au 9 juin 2003
Festival, festival…
Les Étonnants Voyageurs ont choisi depuis 14 ans un cadre somptueux
pour poser leur festival : la ville de Saint-Malo. Ville de corsaires,
sentant encore la poudre du haut de ses remparts, nulle autre ville
ne sied mieux à l’aventure…
Aventure sous toutes ses formes : explorations, récits, science-fiction,
roman policier, bibliographies, roman tout court. Le choix est infini
et la raison se perd un peu devant le programme proposé.
Il y a de tout partout. Rencontres avec les festivaliers dans tous les
coins de la ville, au Palais du grand large, centre de la manifestation,
au délicieux Magic Mirror, posé délicatement au
bord d’un quai et bien sur dans les nombreuses tavernes de la ville.
Honni soit qui mal y pense !
Beau temps par-dessus le marché ce qui ne gâte rien.
Le polar dans tout cela
?
Il faut bien reconnaître que cette année, le polar est
à la portion congrue. Ce n’est pas un reproche, une simple constatation.
L’accent, me semble-t-il avait plutôt été mis sur
l’Europe, la future grande Europe. Une Europe de la culture, trop souvent
déchirée par des luttes fratricides. Pas mal d’écrivains
des ex-pays de l’Est, avec leur sensibilité décalée
par rapport à celle de l’européen moyen. On oublie trop
souvent que l’Europe de l’Ouest est une région du monde particulièrement
protégée. Bien sur, il y a des chômeurs, évidemment,
il y a des pauvres, la démocratie dérape parfois, mais
dans l’ensemble tout le monde peut s’exprimer et manger (à peu
près) à sa faim.
Le polar, produit de luxe, gardait le profil bas et relativement peu
d’animations lui étaient consacrées.
Pourtant Manuel Vasquez
Montalban…
Ben, oui !.. Il était là, le gros cube du polar espagnol.
Je ne dis pas la Rolls Royce, cela le vexerait terriblement, vu ses
opinions politiques. Rappelons rapidement que son opposition à
Franco et son engagement aux côtés des communistes lui
ont valu de longs mois de prison.
Il était là, mais vraiment très discrètement.
Un café littéraire bondé sur l’Espagne, une vague
concertation sur la cuisine et un hommage de Patrick Raynal. Pour le
reste, un vrai courant d’air ? Modestie ou fatigue, on ne l’a guère
vu sur le salon.
Et les autres ?
Quelques irréductibles gaulois s’étaient glissés
dans la sélection. Des gens du cru, généralement.
Ainsi Pierre Bordage, Pascal Dessaint, Jean Failler ou Didier Daeninckx
dédicaçaient à tour de bras sur les stands.
Au Magic Mirror, un joli petit film sur Ricardo Montserrat. Sympathique
rencontre avec l’auteur qui s’explique sur lui-même.
En ville, table ronde autour des dames en noir. Las, Fred Vargas n’y
assiste pas, on se rattrape sur Chantal Pelletier, bien seule face à
la meute.
A la Rotonde Surcouf, haut lieu de la littérature, une rencontre
intéressante entre auteurs français (Coatmeur, ADG, Dessaint)
et anglo-saxons (Eoin McNamee, John Harvey), malheureusement écourtée
pour des problèmes de trains…
Enfin une table ronde européenne sur la science-fiction. Valerio
Evangelisti pour l’Italie, Javier Negrete pour l’Espagne, Pierre Bordage
pour la France et Rachel Tanner pour l’Allemagne ont donné leur
vision de l’histoire et du futur tel qu’ils le voyaient. Passionnant.
Mais Simenon était
là !
Il faut bien l’avouer, assez peu présent. Bien sûr, il
y avait une jolie exposition de photos sur l’homme et sur l’œuvre. A
part ça, un film intéressant sur les traces du voyage
de Simenon en URSS suivi d’un débat sur Simenon, le voyageur
par Michel Carly, spécialiste incontesté de Simenon. A
noter son livre sur le parcours de Simenon aux Etats-Unis.
C’est tout. Maigre, isn’t it pour les fanatiques de l’écrivain.
Grosse déception,
alors…
Non, pas du tout. À côté de notre genre préféré,
il y avait des multitudes de choses passionnantes. Quelques-unes m’ont
plus particulièrement interpellées :
- A l’auditorium, le film du Peuple migrateur, le making off
et la rencontre avec Jacques Perrin.
- Les carnets de voyage de quelques dessinateurs de Bd : Nicolas de
Crécy, Loustal, Emmanuel Lepage et les autres.
- Le débat sur Hara Kiri avec Gebe , Willem et Patrick Raynal.
- L’exposition de Solotareff, admirable peintre pour adultes et enfants.
- Un superbe portrait de Conrad par Marc Bessou et le débat qui
a suivi
- Le, le le… Il y en avait trop, et comme on ne peut se couper en morceaux,
il y a forcement des choix qui font mal.
Des regrets ?
Oui et non ! Difficile de juger ce 14e festival assez fortement perturbé
par les grèves. Un seul exemple : Fred Vargas a annulé
toutes ses interventions du lundi pour prendre un hypothétique
train la ramenant sur Paris.
Le problème avec ce genre de manifestation qui tire vers le gigantisme
est de faire un choix. On est un peu comme l’âne de Buridan. Où
aller et que regarder ? C’est le genre de salon où on se laisse
aller au coup de cœur, où l’on découvre des auteurs inconnus
souvent éloignés de nos lectures habituelles.
N’est-ce pas le but des Etonnants Voyageurs ?
Bernard Reversat
02/06/2003
Saint-Malo à l’heure
des Étonnants Voyageurs
Une nouvelle fois, du samedi
7 au lundi 9 juin, l’embarquement pour un voyage immobile dans l’écrit
et le filmé se fera depuis chez Surcouf et Chateaubriand, à
Saint-Malo.
Au programme du Festival : une
multitude de débats, de rencontres, de projections et de signatures
d’auteurs.
Le polar et le noir y ont toujours
une bonne place. Cette année, l’auteur le plus courtisé
devrait être Manuel Vasquez Montalban. Les portraits de Ricardo
Montserrat et de Jean-François Coatmeur, suivis d’une rencontre,
devraient intéresser les amateurs, tout comme les différents
hommages qui seront rendus à Georges Simenon. Le parfum de Fred
Vargas et de Chantal Pelletier, les dames en noir de service pour cette
édition, pourrait peut être en envoûter plus d’un
lors de leur prestation...
Nous y serons et nous vous rendrons
compte des moments les plus importants. A suivre !
Bernard Bec
Pour le programme complet : http://www.etonnants-voyageurs.net
13/04/2003
22 heures
21e Festival du Film Policier
de Cognac
F I N
Wanted
De Brad Mirman, Canada
Avec Gérard Depardieu, Harvey Keitel, Johnny Hallyday, Renaud,
Saïd Taghmaoui, Stéphane Freiss, Albert Dray et Richard
Bohringer
Film de clôture
Une bande de petits cambrioleurs
parisiens est envoyée à Chicago pour un vol de bijoux.
Mission sans problème, qui vire au cauchemar quand nos amis s‘aperçoivent
qu’ils sont chez un gros mafiosi. Ils vident tout de même le coffre,
sous les yeux stupéfaits du FBI, qui surveillait le truand. Ils
se retrouvent perdus dans Chicago avec la police, le FBI, la mafia et
même un gang de rues aux trousses. Leur seul but est de quitter
l’Amérique pour rentrer bien pépère en France.
A la mort de l’un d’eux, la colère les prend, ils décident
alors de régler leurs comptes…
Un film de copains, agréable à regarder. Renaud, en tueur
déjanté, est à mourir de rire, Depardieu est le
chef, bien entendu, Taghmaoui appelle sa femme tous les jours pour la
rassurer et Hallyday en faux-vrai dur est criant de vérité.
Bref de quoi passer un bon moment, un soir de pluie.
Tout le monde a l’air de s’être bien amusé en tournant
les différentes scènes de cette chasse à l’homme
comique. Certes, il y a des meurtres, des tueries, des assassinats,
mais avec un tel ton emphatique qu’on se dit que c’est du cinéma.
Et c’est du cinéma, à la manière des séries
B de Pierre Dac et Francis Blanche. Les acteurs ont changé, mais
l’histoire est la même et on se dit qu’Audiard aurait pu signer
les dialogues. Pas si mal quand même !
Bernard Reversat
13/04/2003
19 heures
Cognac, 21e édition du Festival
du Film Policier…le palmarès
Le Grand Prix de Cognac revient
cette année à La caja 507 de
Enrique Urbizu. Ce film pronostiqué par Bernard Reversat reçoit
également le Prix de la Critique Internationale, ex aequo avec
Corps à Corps, le Prix Spécial
Police et le Prix Première.
Un nouveau russe de Pavel Longuine a droit
au Prix du Jury.
Le Prix Sang Neuf est revenu à O homen do ano
de José Henrique Fonseca.
Le Prix Cognac du Court Métrage est décerné à
Bloody pizza de Michel Rodas.
Signé Picpus de la série Maigret,
réalisé par Jacques Fansten, reçoit le Prix Cognac
du Téléfilm
Le Public a donné son
avis sur le côté sympathique et disponible des vedettes
invitées et a décerné le 10e Prix Cognac-Tonic
à Véronique Jannot et à
Anthony Kavanagh.
Bernard Bec
13/04/2003
11 heures du mat’
Cognac, The End…ou presque
Le 21e Festival commence, ce
dimanche 13, a avoir du plomb dans les ailes. Le palmarès sera
annoncé ce soir et l’ambiance semble être déjà
retombée. Les nuits courtes doivent être en partie responsables
du calme régnant dans le petit monde des festivaliers. Les VIP
ont des petits yeux. Les journalistes et les photographes restés
pour cette dernière ligne droite sont un peu dans le vague. A
les écouter, le manque de grandes stars à se mettre sous
la dent et les attitudes négatives de certaines au masculin y
sont pour beaucoup.
Le Prix Cognac-Tonic qui doit
être remis ce midi, dans le cadre de l’Hôtel de Ville, devrait
leur convenir et leur permettre de retrouver la forme et la conviction
du premier jour. La présence de trente personnes qui ont participé
au vote sur les deux cent quatre vingt dix huit interrogées,
leur montrera qu’il est possible de greffer un événement
dont le public tient les rênes. Un constat encourageant pour l’avenir.
En attendant les différents
palmarès, profitons encore de cette belle journée printanière.
L’heure est plutôt à la détente.
Bernard Bec
12/04/2003
Cognac, la rue revit…
Voir la cité des eaux-de-vie
revivre dès le matin, c'est encourageant pour le reste de la
journée. La foire commerciale et un beau coin de ciel bleu donnent
une pulsion bénéfique à l'ambiance tristounette
que l'on a connue hier. Boostons-nous, surtout que la venue de Bernard
Tapie est annoncée. Son téléfilm en compétition
est programmé pour cet aprèm'. Le commissaire Valence,
autrement Bernard Tapie, débarque avec tout le staff de la fiction
TFienne et même l'adjoint de Lelay. Le réalisateur, Vincenzo
Marano, est également du voyage. Cognac fais-toi remarquer !
Pendant que l'homme est à
la projection de son film et avant sa conf' de presse, profitons-en
pour écouter, non pas les ventes flash des commerçants,
mais un peu de musique manouche. Un trio de musicos-luthiers installés
juste devant les Récollets nous font chaud au cœur et se paye
un petit succès. Les pièces de monnaie tombent dans l'étui
noir d'une guitare. Employés chez Maurice Dupont, ils ont bien
entendu réalisé leurs instruments. Chapeau, les artistes
!
Swing 16
Le temps de faire un tour pour
voir les préparatifs de la Nuit Rouge, une boite aménagée
pour l'occasion dans un ancien grand magasin désaffecté
du centre ville, et de se payer un rafraîchissement à une
terrasse de café, me revoilà au bar de la presse pour
écouter Tapie. Même si l'on ne peut pas oublier les arnaques,
les escroqueries qui lui ont fait passer quelques mois à l'ombre,
l'homme a du charme et sait bien renverser la vapeur. Il joue sur la
réalité, sa réalité, celle dont nous avons
entendu parler pendant des mois et des mois, pour expliquer la série
dont le premier épisode vient d'être projeté. Du
style : J'ai été assez suivi en vrai par des flics
pour savoir comment je dois faire lors d'une filature de fiction.
Et voilà comment l'homme retourne les journalistes présents
et déclenche les rires de certains. Pour continuer sur le sujet,
attendons de voir Commissaire Valence jeudi prochain à 20h55,
et si on sent un certain courant passer, nous ferons un portrait de
l'homme. A suivre !
A sa sortie du point presse, 300 à 350 personnes l'attendaient
pour avoir des autographes. Impressionnant. Le contribuable français
semble oublier vite. La magie "Tapie" a encore de longues
années devant elle !
Pour se régénérer,
allons refaire un tour place François 1er, l'ambiance s'y est
déplacée. Tiens on y rencontre "Portal" des
Cordier. C'est vrai qu'il est lui aussi à Cognac. Pas vraiment
incognito, vu le nombre d'autographes qu'il signe, mais pas vraiment
invité par le festival. Ce n'est pas encore cette année
qu'il recevra le Prix Cognac-Tonic, décerné demain par
le public. Et pourtant, l'ami Julien Chatelet est un amour, pas mal
de femmes cognaçaises vous le diront…
Y a même une fanfare, avec une bonne pêche !
Les forains ont rangé
leurs étals, la fin de journée s'annonce bien. Un petit
tour au cocktail dînatoire du conseil général et
après, à minuit, un plongeon dans les bras de Morphée.
Faut pouvoir tenir jusqu'aux différents palmarès de demain.
Bernard Bec
Maintenant c'est à toi
Bernard !
Corps à corps
De François Hanss et Arthur-Emmamuel Pierre, France
Avec Emmanuelle Seigner, Philippe Torreton et Clément Brilland
Film en compétition.
Laura, strip-teaseuse et prostituée
vit péniblement, dans une boîte de second ordre. Elle rencontre
un homme, fou amoureux d'elle. Situation banale s'il en est. Il est
riche, elle est belle, ils s'aimeront jusqu'à la fin des temps…
Un condensé de Blanche-Neige et de Cendrillon.
Un grave accident de Laura remet tout en question : coma, brûlures,
greffe de la main, chirurgie lourde, surdité, notre héroïne
passe de sales moments. Heureusement, le Prince Charmant ne l'a pas
abandonné et son seul souci est de se marier avec elle.
Quelques années de bonheur, un enfant et crac ! le drame. A la
suite d'une consultation de routine, elle apprend que son mari a été
marié, qu'il a changé de nom et même de profession.
Affolée, elle veut en savoir plus, Son ciel bleu vire au noir,
le cauchemar s'installe. Plus son enquête avance, plus elle craint
pour son fils…
Au-delà de l'intrigue assez conventionnelle, le film essaie de
montre comment un homme d'une intelligence exceptionnelle, à
la suite de circonstances traumatisantes, peut basculer dans la folie.
Fou obsessionnel qui cherche à recréer, quel qu'en soit
le prix, son bonheur passé. Clone de Frankenstein a qui sa créature
échappe. Alors, ultime réserve, il ne lui reste plus que
la violence pour s'exprimer.
Un premier film honnête malgré quelques défauts.
Débuter par une voix off est bien vu mais n'excuse pas la lenteur
de la mise en place de l'histoire. La confession aussi est un peu lourde
et la fin moyennement crédible. Passons sur ces défauts
de jeunesse pour garder le souvenir d'une œuvre sympathique, méritant
d'être encouragée.
Bernard Reversat
La caja 507
D'Enrique Urbizu, Espagne
Avec Antonio Resines, Jose Coronado et Goya Toledo
Film en compétition
Il était une fois une
jeune fille bien sous tous les rapports et qui comme toutes les jeunes
filles bien mentait à ses parents. D'où une escapade romantique
dans la pinède, au bord de la méditerranée. Manque
de pot, un incendie se déclare et la fillette y perd la vie.
Sept ans plus tard, Modesto Pardo, directeur d'une petite agence bancaire
est victime d'un braquage. Les voleurs ayant pris sa femme en otage,
il se retrouve drogué, dans la salle des coffres. C'est alors,
que par le plus grand des hasards, il découvre des documents
prouvant que sa fille n'est pas morte par hasard comme l'avait cru la
police. Il décide alors de faire justice…
Modesto est un homme simple, sans grande ambition, amoureux de sa femme.
Depuis le drame qui a frappé la famille, c'est sa seule consolation.
La voir sur un lit d'hôpital, dans le coma semble être le
déclic qui le pousse à la vengeance. Il aura la peau des
salauds qui ont bouleversé sa vie. Une enquête facile,
il a des noms, des comptes en banque, des accords secrets entre fonctionnaires
pourris et riches maffieux. De quoi créer un énorme scandale.
L'agneau revêt la défroque du loup. Il joue sur tous les
tableaux, exerce chantage sur chantage, bref utilise les mêmes
méthodes que ses adversaires. "J'ai changé",
dira-t-il à sa femme. Conclusion désabusée d'un
honnête homme ayant plusieurs morts sur la conscience.
Un film intelligent et sensible reposant sur la remarquable performance
d'acteur d'Antonio Resines. Un brave citoyen moyen, ni bon, ni mauvais
se transforme brutalement en Machiavel impitoyable. Que ferions-nous
à sa place ? Agir ou se réfugier frileusement dans le
désespoir et l'auto- apitoiement. Modesto Pardo a choisi. Respectons
ce choix.
Bernard Reversat
Un nouveau russe
De Pavel Longuine, France-Russie
Avec Vladimir Machkov, Maria Mironova et Andreï Krasko
Film en compétition
En 1988, cinq amis, jeunes universitaires
abandonnent leurs études pour faire de l'argent dans le business
post-soviétique. Dans une économie à l'agonie,
Platon et ses camarades inventent milles combines financières.
La légalité en prend un coup et nos compères passent
le plus clair de leur temps à jouer à cache-cache avec
le pouvoir. Tout semble leur réussir et ils amassent rapidement
une énorme fortune.
Toute médaille ayant un revers, ils se font d'innombrables ennemis.
On jalouse leur réussite. L'ancien mari de Laura, petite amie
de Platon, est le plus acharné. Dépit ou amour de la justice,
qui sait ? Autre ennemi de poids, Lemov, candidat à la présidence,
ancien allié de Platon, qui l'a lâché et traîné
dans la boue. Dans une société ne s'encombrant guère
de principes, tuer Platon n'est qu'une formalité vivement expédiée.
Ce qui fait l'intérêt du film, au-delà de la réussite
d'un homme, sont les rapports qu'il entretient avec ses amis. Si Platon
est le fonceur, le maître d'œuvre, il n'existerait pas sans Victor
le mathématicien génial, véritable machine à
calculer les coups foireux. Ni sans Larry, "bouche d'or",
irremplaçable dans les négociations. Ni sans Mark, le
chien fidèle. Ni sans, le moins intelligent, le doux, l'ami des
bêtes, son presque frère. Ensemble, ils forment une force
indestructible. Séparément, sauf peut-être Larry,
ils deviennent des cibles faciles à abattre.
Le scénario alterne séquences en temps réel et
retours en arrière permettant de découvrir le passé,
les réussites et les déconvenues de Platon et ses amis.
C'est bien mais c'est long. Depuis Titanic, tout réalisateur
qui ne pond pas plus de deux heures, à l'impression de travailler
pour la télévision. Dommage, le résultat, somme
toute, agréable aurait gagné en rythme et en compréhension.
Bernard Reversat
Sympathy for Mr Vengeance
De Park Chan-Wook, Corée du sud
Avec Ha-Kyum Shin, Kang-Ho Song et Du-Na Bae
Film en compétition.
Ryu, jeune homme sourd et muet
essaie par tous les moyens de payer la greffe de rein dont a besoin
sa sœur. Il va jusqu' rencontrer des trafiquants d'organes pour se procurer
le nécessaire. On lui demande un rein et tout son argent. Les
trafiquants le roulent , il se retrouve sans rien. Désespéré,
il décide de kidnapper la fille de son ancien patron et trouver
les quelques millions qui pourraient payer l'opération.
Au début, tout semble facile. La rançon est payée,
tout baigne, sauf que la sœur se suicide. Pour tout arranger, la gamine
enlevée, se noie accidentellement. Le père inconsolable
décide de se venger. Avec l'aide d'un détective privé,
il mène son enquête. La logique impitoyable veut que les
deux hommes finissent par se rencontrer…
Le scénario est touffu et compliqué à l'extrême.
Les plans qui se succèdent rapidement n'aident pas vraiment à
la compréhension de l'histoire. On peut de demander qui est le
bon et qui est le mauvais. Les deux héros ont été
spoliés et réagissent différemment suivant leur
milieu. Tous les deux se conduisent avec sauvagerie. Tous les deux sont
des justiciers. Seule l'échelle des valeurs change. Et si kidnapper
un enfant est inacceptable, voler un rein n'est pas plus glorieux. Faut-il
pour cela utiliser la violence, se comporter comme un tortionnaire nazi.
Pas de pitié pour les perdants ! semble être le leitmotiv
du film. Un peu court pour excuser la perversité de certaines
scènes.
Un film au traitement primaire, qui aurait mérité un peu
plus de subtilité. Le premier degré est omniprésent
et ce n'est pas les remords (?) des assassins qui changeront quelque
chose. C'est d'autant plus dommage que les vingt premières minutes
du film laissaient augurer d'un tout autre traitement.
Bernard Reversat
Un choix ?
La messe est dite, reste à
en tirer les fruits : En l'absence de Emmett's mark de
Keith Synder, le meilleur film est pour moi, La Caja 507
d'Ernique Urbizu, suivi d'assez près par Un nouveau Russe
de Pavel Longuine. Corps à corps de François
Hanss et The man in white de Takashi Miike sont honnêtes,
les autres sont à oublier.
11/04/2003
Humide vendredi à Cognac
Ce jour commençait plutôt
mal. La pluie était de retour, le sun s'en était allé
sous d'autres cieux. En ville, la vie avait repris son rythme hors festival.
Seules les banderoles des partenaires et quelques voitures officielles
rappelaient tout de même l'existence de l'événement
phare de la ville. Abrité sous un parapluie, profitons-en pour
flâner et pour découvrir les boutiques du centre ville
décorées aux couleurs du festival.
L'après midi, malgré
le temps incertain, cinq cents enfants des écoles cognaçaises
et charentaises déambulaient dans les rues de la cité.
Et oui, comme chaque édition du festival, ils menaient l'enquête,
habillés en détective et même, pour certains, maquillés
façon Hercule Poirot. Tous, avec leurs professeurs, devaient
se retrouver autour d'un goûter servi après avoir résolu
l'énigme et donné les bonnes réponses aux questions
de Pascal Pierre, l'archiviste de Cognac.
Comme par magie, vers les 18h30,
le ciel lassé de déverser sa pluie devint plus clément.
La célèbre cérémonie de la prise des empreintes
pouvait se tenir devant un nombreux public. Place François 1er
des centaines de personnes regardaient les vedettes, les touchaient
presque. Les chasseurs d'autographes en profitaient, les photographes
aussi.
Retenons celles et ceux qui depuis
le début jouent le jeu avec le public. Adorables Sabine Haudepin,
Véronique Jannot et Éva Darlan toujours accompagnée
de son adorable toutou. Coté mecs, le lauréat du Prix
Cognac-Tonic de l'an dernier Bernard Farcy, Anthony Kavanagh, François
Marthouret, Renny Harlin ou encore Édouard Montoute, Etienne
Chicot et Jean-Claude Dauphin.
Après avoir parcouru les
centaines de mètres de l'artère piétonne, tout
ce beau monde, plus quelques uns, se retrouvaient au marché couvert
pour un cocktail et une rencontre avec le public. Les membres du Lions
Club féminin de Cognac proposaient au bénéfice
de l'enfance déshéritée la célèbre
rose du festival. Josiane Pestiaux, l'une de ces dames, au charme fou,
en obtenait encore plus des vedettes. La preuve.
Comme ce cocktail est parrainé
par le Pineau des Charentes, certains Invités se sont même
retrouvés introniser par le Grand Maître de la Confrérie
du Franc Pineau.
Après, il ne restait plus
qu'à se rendre à la soirée de 13ème RUE,
qui avec la marque Meukow, savent créer une ambiance appréciée
par tous les festivaliers et un public de plus en plus nombreux. Merci
de penser à ceux qui le composent et qui permettent aux Stars
et autres VIP d'exister.
Bernard Bec
Et pendant tout ce temps, Bernard
Reversat, se payait deux toiles…voici ses critiques :
The man in white
De Takashi Miike, Japon
Film en compétition
Azusa est un garçon perturbé
qui a trouvé refuge auprès du chef des Renjos, une famille
de Yakusa. Hikokura, ce chef est éliminé alors qu'il se
rendait à un mariage. Azusa ne pense plus qu'à une seule
chose : le venger. Ce qui n'est pas forcément simple ! Au-delà
du tueur, il cherche à remonter jusqu'au commanditaire. Pas facile
avec les Yakuza où, traditionnellement la loyauté prime
et le silence est d'or. Enfin, presque, quelques arguments contondants
pouvant changer le cours des choses. L'inflation de cadavres va de pair
avec l'avancement de l'enquête.
De future victime, le tueur d'Hikokura se retrouve l'allié provisoire
d'Azusa. Avec son aide et celle d'un ami, les choses avancent rapidement,
les cadavres continuent à s'amonceler sans que l'on voie l'ombre
d'un policier. Les règlements de comptes se passent en famille,
au pays du soleil levant.
Un film d'une violence extrême laissant les super-productions
américaines au rang de jouets pour jardins d'enfants. Les plans
sont lents, chaque séquence est détaillée à
l'extrême. On peut regretter quelque complaisance à montrer
cadavres et hémoglobine, tout en tenant compte du mode de pensée
japonais pour qui la mort n'est pas forcément une catastrophe
intolérable. Nous n'avons pas à porter de jugement, certains
mafiosi européens n'étant pas des plus reluisants.
Signalons aussi, l'alternance de la réalité et des souvenirs
du héros. Cette intrusion du passé donne au film une curieuse
émotion non dénuée de sensibilité. Azuka
n'est pas une brute, il est le produit d'une enfance difficile, à
la limite du supportable. On comprend mieux cette rage de détruire
qui l'anime le plus souvent.
Un film difficile et ambitieux qui a le mérite d'essayer de nous
faire comprendre les mécanismes délicats de la pensée
Yakusa mais qui reste trop long.
Bernard Reversat
The recruit
De Roger Donaldson, Etats-Unis
Film en compétition
James Clayton est un brillant
étudiant en informatique. Walter Burke, chasseur de têtes
pour la CIA cherche à le recruter. Il sent que ce gamin a le
potentiel pour faire un excellent agent. Bientôt, James se retrouve
à la "ferme" ou il apprend les mille subtilités
du métier d'agent secret. Il rencontre une jeune femme Layna,
dont il tombe amoureux. Sa relation avec Burke laisse aussi à
désirer et le jeune homme se demande s'il est vraiment fait pour
rester dans ce milieu. Il est alors envoyé en mission : démasquer
une taupe… qui n'est autre que Layna…
Que dire de ce film à la gloire de l'Amérique et de ses
services de renseignements ? Le centre d'entraînement avec ses
barbelés et son service d'ordre surarmé est très
démocratique et donne d'emblée le ton du film. Le reste
oscille entre un catalogue de vente de gadgets par correspondance et
la glorification des héros anonymes morts, au combat, pour leur
patrie. Navrant.
On se demande ce que viennent faire Al Pacino et Colin Farrell dans
cette galère. J'espère pour eux que le cachet était
conséquent.
Un film insignifiant, déjà cent fois vu, bien dans la
lignée de George W. Bush Junior. Engagez-vous, rengagez-vous,
vous vous ferez tuer glorieusement pour une Juste Cause. Et n'oubliez
pas de voter Républicain !
Nul doute que le film plaira dans un pays où il y a plus d'armes
que d'habitants. Revoyez plutôt (en DVD, s'il vous plaît)
"Les trois jours du Condor". L'idéologie est moins
tristounette et l'histoire est autrement intéressante.
Bernard Reversat
10/04/2003
Soleil, fanfares et manifestants
à Cognac pour le début du 21e Festival du Film Policier.
Après la douche d'hier,
cela faisait plaisir de retrouver la lumière particulière
de la Charente. Et c'est sous ce climat printanier que l'oiseau blanc,
venant de Roissy et transportant la plus grande partie des Invités,
se posait à 16 heures sur la piste de l'aérodrome de la
cité des eaux-de-vie.
Une trentaine de salariés
de chez Martell ont bien tenté de perturber cette arrivée,
mais comme en face d'eux se trouvaient un nombre égal de CRS,
leur opération de communication sur le plan de restructuration
de leur entreprise par leur nouveau propriétaire, le groupe Pernod-Ricard,
ne pouvait aboutir.
Au lieu que les VIP empruntent
la sortie habituelle, c'est par une porte de service de la base militaire
709 qu'ils prirent la direction de Cognac. Le Festival, sans que ses
Invités le sachent, venait de vivre un début inhabituel.
La fanfare prévue pour
l'accueil s'est vite retrouvée à animer les terrasses
de la place François 1er en plein centre ville pour le bonheur
des cognaçais.
Les vedettes du festival avaient rejoint leurs hôtels pour se
refaire une beauté et pour vivre d'autres aventures. A leur programme
de cette fin de journée, l'inauguration du festival, avec le
premier bain de foule, les premiers autographes signés et les
premiers sourires "cheese" pour les photographes.
Si, sans donner de noms, certains
des invités n'étaient pas au top de leur forme à
moins qu'ils ne sourient que lorsqu'ils se brûlent, ce n'était
pas le cas de Véronique Jannot, Agnès Soral, Christine
Boisson, Philippine Leroy-Beaulieu, Sabine Haudepin côté
femmes et Vincent Lindon, Richard Anconina, Bernard Farcy et Anthony
Kavanagh côté mecs. Les chasseurs d'autographes étaient
comblés tout comme les photographes amateurs ou pros.
Le lever de rideau à la
"Maigret" de l'inauguration terminé, les choses sérieuses
devaient commencer. Jérôme Mouhot, le maire de Cognac,
déclara "qu'il s'était longuement interrogé
sur le bien-fondé de l'existence du Festival en cette année
trop marquée nationalement et internationalement par la souffrance.
Qu'après réflexion, l'événement cognaçais
pouvait être un moyen, une passerelle, pour la paix et pour la
fraternité. Le 7e Art et le polar en particulier ne jettent-ils
pas un regard cru sur la société tout en lui offrant une
tribune pour quelle puisse rebondir". Jérôme Mouhot,
pour terminer son allocution et peut-être pour clore un débat
interne à Cognac, a tenu à rappeler l'osmose qui devait
exister entre la Ville de Cognac et son Festival.
Après le mot, court et soft, de Lionel Chouchan, le délégué
général du festival, on eut droit la présentation
de trois jurys, Spécial Police, Téléfilms et Longs
Métrages. Ils étaient tous présents ou presque.
Vincent Lindon le président du Festival et du grand jury réglait,
d'entrée de jeu, le compte au président du jury Spécial
Police, le commissaire Marc Caliaros, qui avait, avec humour, déclaré
précédemment sur la scène du théâtre
avoir remarqué que seuls les membres de son jury portaient cravate
et étaient rasés de près. Et ça, le rasé
de trois jours qu'est Lindon avait eu, semble-t-il, du mal à
digérer le trait d'humour du Directeur Départemental Adjoint
de la Sécurité des Yvelines. La guerre des jurys serait-elle
née en ce début de soirée et en public ?
Pour terminer cette inauguration, l'humour gagna tout de même
sur la tension qui régnait. Renny Harlin, l'Invité d'Honneur
de cette 21e édition, qui depuis plus de dix ans souhaitait venir
à Cognac, était heureux que ce jour soit enfin arrivé.
Même si, tout juste arrivé en France, la police avait failli
le verbaliser pour une infraction, il espérait que tout se passerait
bien ici ainsi que lors de son retour. La connaissance de certains grands
noms de la police devrait l'y aider.
Jury Long Métrage
Voilà, la cérémonie
touchait à sa fin ou presque. Sous de chaleureux applaudissements
tout ce beau monde, se fit photographier et les six cents personnes
présentes pouvaient regarder, en avant-première Mais
qui a tué Paméla Rose d'Éric Lartigau. Deux
des acteurs et scénaristes, Kad et Olivier, présentèrent
leur bébé avec l'humour qu'on leur connaît. Leur
prestation scénique, réussie à mon avis, avait
bien chauffé la salle. La projection partagea en deux camps,
semble-t-il, les spectateurs, mais ça, c'est une autre histoire
!
Bernard Reversat y était, c'est à lui maintenant.
Bernard Bec
Mais qui a tué Pamela
Rose ?
D'Éric Lartigau, France
Avec Kad et Olivier, Jean-Paul Rouve et Gérard Darmon
(Film d'Ouverture du Festival projeté
en avant-première)
C'est l'histoire à première
vue banale de deux agents du FBI envoyés sur une sombre affaire
de meurtre en pleine cambrousse. D'un côté, nous avons
Ripper, homme posé, instructeur scrupuleux et parfait modèle
de l'agent du FBI. De l'autre Bullit, est un homme de terrain aux curieuses
méthodes. Grossier, mal rasé, il représente l'archétype
complètement déglingué de l'infiltré dans
les gangs de drogue.
Le mélange des deux genres est explosif, les deux agents ont
un peu de mal à coordonner leurs démarches. Mais un meurtre
étant un meurtre, le principal est de trouver le coupable, quelles
que soient les méthodes employées. Rien ne manque au scénario,
ni le shérif peu coopératif, ni l'idiot du village, avec
en prime le vilain méchant pas beau. Du déjà vu,
me direz-vous ! De l'Arme fatale, en passant par Men in Black,
nombreux sont les couples maudits du cinéma d'action.
Oui, mais… d'entrée de jeu, les cartes sont biseautées
et la dédicace du film "A Christophe Colomb qui a découvert
l'Amérique" donne immédiatement le ton. Nous nageons
en pleine gaudriole, dans la grosse farce gauloise (excusez-moi américaine),
que n'aurait pas renié l'auteur de Fantasia chez les ploucs
! L'histoire n'est qu'une suite inénarrable de gags plus
ou moins grossiers qui laissent le spectateur pantois. Le sabir franco-anglais
des sous-titres est à hurler de rire et le "yellow ruban
of police", inscrit sur les marquages entourant la zone criminelle,
tient plus du surréalisme que du comique.
De délire verbal en coups tordus (ah ! le faux générique
de fin), nos deux compères découvrent les coupables dans
une débauche psychédélique qui rappelle parfois
Cinecitta de Fellini.
Le résultat est une satire, plus fine qu'il n'y paraît,
des sempiternels films d'action des grandes firmes hollywoodiennes.
Un excellent début de festival qui nous place, il va sans dire,
sous le signe de la fête.
Bernard Reversat